BRAZZAVILLE, 03 FÉV (ACI) – Des chercheurs, entre autres, des spécialistes de la littérature congolaise, des sociologues, des historiens et des politiste, ont apporté, le 30 janvier dernier à Brazzaville, l’éclairage sur le terme «Etre vivant…..ensemble », en vue de faire circuler l’actualité de la pensée contemporaine.
Ces chercheurs, ceux venus de l’étranger et ceux du Congo, ont donné leurs points de vue respectifs sur la question lors de la quatrième édition de la nuit des idées, organisée par l’Institut français du Congo (Ifc).
Intervenant à cette occasion, M. Joseph Tonda, professeur au département de sociologie de l’Université Omar Bongo de Libreville, a estimé que «Etre vivant» en Afrique centrale renvoie à une apparence qui cache la réalité de l’absence ou de la mort. Selon lui, ce terme peut aussi signifier «chercher la vie». «Souvent, les jeunes vont en Europe chercher les conditions meilleures de vie pour fuir la misère de l’Afrique, car, disent-ils, la vie a été transportée et déposée en occident. Faire la vie, c’est donc vivre la plénitude des sensations», a-t-il poursuivi.
Pour sa part, Mme Florence Bernault, professeur d’histoire de l’Afrique sub-Saharienne à Sciences-Po de Paris, en France, a centré son intervention sur la pensée des philosophes et historiens occidentaux. A son avis, ceux-ci se posent la question de savoir pourquoi est-il criminel de désacraliser la tombe d’un mort et de profaner les restes mortels en Europe.
Selon elle, le régime philosophique et idéologique sous lequel le monde vit est celui du 18ème siècle avec la désacralisation et la sécurisation du christianisme. Elle a estimé que la matière physique du vivant n’est pas sacrée, car étant un mécanisme biologique. «L’imaginaire et les pratiques africaines sont symbolisés au-delà de la simple signification matérielle. En Afrique, toute personne, toute existence, et tout corps sont symboliques, et le corps de l’homme est resté sacralisé, investi et porteur de pouvoir», a-t-elle poursuivi.
M. Nicolas Martin Granel, agrégé de lettres classiques et diplômé des sciences politiques, a axé son propos sur l’étude des manuscrits de Sony Labou Tansi, dont il est l’éditeur scientifique. Pour lui, ce qui frappe, ce n’est pas le mot «Vivant», mais plutôt l’expression «Etre». A son avis, la césure entre la vie et la mort n’existe pas, il y a plutôt une continuité. Il a souligné que l’homme ne naît pas vivant, il le devient à force «d’encre, sueur, salive et sang».
Quant au chercheur Remy Bazenguissa, il a porté sa réflexion sur l’humain qui caractérise la vie. Celle-ci est le fait d’être présent au monde. En effet, l’homme partage le caractère vivant avec d’autres espèces, à la différence qu’il parle. L’homme, qui est pourtant sacré, se trouve avec une vie qui n’est pas protégée par l’Etat. Il y a des cas de figures en Afrique qui ont des garanties par l’Etat, mais qui peuvent être sacrifiées.
A ce propos, il a cité le cas du retraité, qu’il définit comme une personne qui a quitté le monde du travail parce qu’il a atteint un certain âge qui l’installe dans la séniorité. Aussi, selon lui, dans plusieurs pays africains, l’Etat ne tient pas la promesse faite aux retraités. M. Remy a peint ce cas de figure pour parler de l’existence du corps et non du sujet politique.
Pour cette quatrième édition de la nuit des idées, 220 débats ont rassemblés des écrivains, des scientifiques, des économistes, des historiens, des artistes et des architectes dans 90 pays et 190 villes à travers le monde. La soirée de lancement de cet événement international a eu lieu au ministère de l’Europe et des Affaires étrangères, en France. (ACI/ Mamane Boungou)