BRAZZAVILLE, 26 MARS (ACI) – Les autorités perdent du temps et risquent de se laisser rattraper par le coronavirus, a dit la biologiste et directrice de la Fondation congolaise pour la recherche médicale, Mme Francine Ntoumi, spécialiste des maladies infectieuses, au cours d’une interview qu’elle a accordée à l’hebdomadaire Jeune Afrique.
Le faible niveau de préparation du Congo et de ses pays voisins pour contrecarrer la maladie est inquiétant, alors que jusque-là, l’Afrique centrale est encore peu touchée par le coronavirus, a-t-elle estimé.
Au 25 mars, quatre cas ont été recensés au Congo, 48 en République démocratique du Congo (Rdc), 6 au Gabon, et 2 en Angola. Il n’est donc pas trop tard pour limiter la pandémie, a-t-elle fait savoir.
«Nous sommes en permanence dans la préparation. Des hôpitaux ont été sélectionnés par les autorités pour accueillir les cas qui seraient identifiés. Ces centres sanitaires devraient être équipés et le personnel formé. La population congolaise n’étant pas immense, on peut encore limiter les dégâts en prévoyant un maximum de respirateurs. Mais on ne se préoccupe de tout qu’à la dernière minute. En Italie, le nombre de morts est directement lié au niveau de la préparation de ce pays», a-t-elle fait remarquer.
«Certes, les mesures barrières sont mises en place. Nous avons lancé une étude sérologique auprès de la population, selon les demandes de l’OMS, afin d’essayer de comprendre le scénario dans chaque pays. La task-force mise en place, chargée de préparer la riposte, ne comprend que des politiques. Il y a eu Ebola, le Chikungunya, maintenant nous avons le Covid-19. Cependant, les responsables ne semblent toujours pas comprendre que les scientifiques ont un rôle à jouer afin de contribuer à l’effort collectif. Une task-force sans scientifiques, c’est embêtant» a-t-elle déploré.
Parlant de la propagation de la pandémie, Mme Ntoumi pense qu’au Congo, les gens ont tendance à vivre les uns sur les autres, sous le même toit. Il n’est donc pas impossible que la contagion n’explose pas.
Mme Ntoumi participe actuellement à une vaste étude internationale menée sous l’égide de l’Organisation mondiale de la santé (Oms). Elle plaide pour que les scientifiques, notamment africains, soient invités à jouer un rôle plus important dans la lutte contre le virus.
Au Congo, cette lutte est coordonnée conjointement par les ministères de la Santé et de la Recherche scientifique. L’étude menée sur la pandémie est placée sous l’autorité du ministre de la Recherche scientifique, M. Martin Parfait Aimé Coussoud-Mavoungou. La mise en place d’un comité scientifique est envisagée. (ACI)