BRAZZAVILLE, 25 FEV (ACI) – Les langues maternelles prennent du recul depuis des décennies, et si l’on n’y prend garde, elles n’existeront plus que de nom au profit du français, a fait constater, récemment à Brazzaville, le coordonnateur du Centre de recherches sur la musique et la culture traditionnelle africaine, M. Elvis Natu.
Il a fait ce constat au cours d’une conférence-débat sur la langue maternelle, organisée au Cercle culturel Sony Labou Tansi, à l’occasion de la célébration de la journée Internationale des langues maternelles.
Exposant sur le thème «Les langues maternelles et la mondialisation», M. Natu a dit que plusieurs Congolais sont incapables de s’exprimer dans leurs langues maternelles ou de construire deux ou trois phrases sans emprunter des mots au français. D’après lui, cette attitude favorise le déclin de la culture, alors que la langue maternelle est un code de communication qui détermine non seulement un peuple ou une identité ancestrale, mais aussi une personnalité.
Il a souligné que la perte de l’identité culturelle n’aide pas les jeunes à connaître l’utilité des langues maternelles. «Il est plus facile de réfléchir et de rédiger en langues maternelles puis de traduire avec les mots plus adaptés en français que de faire le contraire, car la langue est l’une des clés de la recherche en sciences sociales et humaines», a conclu M Natu.
Le désintéressement des parents envers les langues maternelles à de graves conséquences sur la jeunesse, s’est indignée Mme Raïtel Yengo, journaliste et promotrice de ladite conférence-débat sur la langue maternelle.
«Si l’enfant ne connaît pas la langue maternelle de ses parents, il ne connaîtra pas non plus l’origine, l’identité et la culture de ces derniers. Les parents doivent par conséquent prendre l’engagement de parler leurs langues maternelles dans les foyers afin de les perpétuer et d’aider les jeunes à s’en approprier, car nous devons préserver l’identité par le biais desdites langues», a-t-elle dit.
Selon elle, le gouvernement a donc la responsabilité de vulgariser les ouvrages traduits en langues par la Société internationale des linguistes (Sil-Congo). Aussi, le ministère de l’enseignement devrait travailler de concert avec les écoles afin de mettre ces ouvrages au programme pour être étudiés par la jeunesse.
Elle a souligné qu’il est souhaitable de sensibiliser les élèves sur le nombre d’ethnies du Congo, sur telle ou telle langue parlée dans tel département à représenter sur la carte pour permettre aux jeunes de mieux connaître leur pays, et sur les différentes langues maternelles et localités du pays», a insisté Mme Yengo.
A son avis, les médias chauds (Télévision et Radio) devraient prendre le relais en organisant des émissions d’au moins 5 minutes en langues maternelles pour susciter l’intérêt des jeunes pour ces langues.
La République du Congo reconnaît la pluralité linguistique. La constitution du 25 octobre 2015, en son article 28, au 1er alinéa, dispose que «le droit à la culture et au respect de l’identité de chaque citoyen est garanti». Aussi, la loi n°9-2010 du 26 Juillet 2010, portant orientation de la politique culturelle congolaise, en son article 8 stipule, que «l’Etat assure la promotion des langues nationales et les traditions orales, encourage la création privilégiée des lieux pour la pratique de ces langues», a rappelé le représentant du ministre de la Culture et des arts.
Plusieurs personnalités ont été présentes à cette conférence-débat, entre autres le représentant du ministre de la culture et des arts, le conseiller culturel du Premier ministre, la représentante du Haut-commissariat à l’instruction civique et à l’éducation morale, le doyen de la Faculté des lettres, arts et sciences humaines (Flash) et le directeur général du patrimoine et des archives. (ACI/Mamane Boungou)
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