Journaliste, ancien directeur de l’information à l’Agence congolaise d’information, M. Benjamin Mankedi est aussi écrivain, auteur de plusieurs publications. Dans le cadre de l’édition spécial relative à la célébration de la journée de l’indépendance, il s’est prêté aux préoccupations de l’ACI sur son œuvre. Voici l’intégralité de cette interview.
Agence Congolaise d’Information (ACI) : Pouvez-vous nous parlez de vos publications littéraires ?
Benjamin Mankedi (BM) : A ce jour, j’ai deux publications. Il s’agit des romans. Le premier, intitulé « Les dieux de Zéno », a été publié en 2013. Il pose la problématique de la liberté de la presse. Le deuxième, « Couleurs équatoriales », paru en 2015, est un regard porté sur les travers de la nature humaine.
ACI : En l’an 2000, votre pièce intitulée « Être nègre et crever » a été jouée à l’Institut français du Congo, à Brazzaville. Quel souvenir gardez-vous de ce moment ?
BM: D’abord, je dois avouer que cela m’avais procuré une certaine satisfaction morale, en ce sens que j’avais perçu cette représentation comme un encouragement des efforts consentis pour la rédaction de ce texte. En effet, je garde quelques souvenir de ce moment. Mais le plus fort s’avère être les moments à la fois difficiles et plaisants des répétitions, au cours desquelles les acteurs se faisaient violence pour incarner les personnages et harmoniser leurs rôles respectifs avec leur présence sur scène.
ACI : Quand et comment vous est venue cette passion pour l’écriture ?
BM : Collégien, je m’intéressais à la lecture des romans policiers. Cet exercice me donnait l’impression de suivre un film chaque fois que je lisais un livre de ce genre. Mais c’est au lycée, notamment, en classe de seconde, que j’ai eu la passion pour l’écriture. Celle-ci m’est venue à la suite de deux faits marquants. Le premier a été l’écoute d’une émission culturelle à la Télévision nationale, dont l’invité était le poète congolais Martial Sinda. Le deuxième fait a été la lecture d’une anthologie des poètes congolais. C’est ainsi que mes premiers textes ont été des poèmes.
ACI : Pouvez-vous nous parler de vos principales sources d’inspiration et quels sont les auteurs qui ont une influence sur votre style ?
BM : Mes sources d’inspiration sont variées. Une scène de vie courante peut susciter une idée ou des idées capables d’amener tout écrivain à produire un texte romanesque, une nouvelle, un poème ou une pièce de théâtre ; de même qu’une phrase lue dans un livre peut constituer aussi une source d’inspiration.
A propos du style, je dirais que chaque auteur a son style, ce qui est tout à fait normal. Cependant, il n’est pas impossible d’y déceler quelques influences des grandes notoriétés littéraires. Pour mon cas, je dirais qu’il m’arrive d’être plus ou moins influencé par Sony Labou Tansi, surtout dans mes textes de théâtre.
ACI : Autrefois, les bibliothèques étaient prises d’assaut par les lecteurs de toutes les catégories. Quelle lecture faites-vous du peu d’intérêt que les Congolais ont pour le livre aujourd’hui ?
BM : Le constat est triste. En effet, aujourd’hui, très peu de gens s’intéressent à la lecture. Les causes de cette situation sont sûrement multiples. Je peux parler du coût de production du livre, qui influence le prix de vente susceptible de refroidir le désir de passer à l’achat. Je peux aussi parler de l’influence de plus en plus grandissante de l’image soutenue par les réseaux sociaux. La facilité de comprendre le message véhiculé par l’image effrite toute volonté d’être en face d’un livre dont le contenu nécessite des heures de lecture pour être saisi. Je peux aussi dire que la disparition des bibliothèques publiques a éteint la proximité existante autrefois entre le livre et le lecteur. Cette proximité a longtemps été un facteur déclencheur de l’intérêt pour le livre.
ACI : Que devraient faire les pouvoirs publics pour y remédier ?
BM : D’aucuns diraient que la force d’une nation réside dans la culture. Partant de cette assertion, je dirais que notre pays gagnerait beaucoup si les pouvoirs publics pouvaient penser davantage à une politique de rapprochement du livre vis-à-vis du lecteur, particulièrement de la jeunesse. Pour cela, il serait intéressant de ne pas percevoir l’internet ou le numérique comme un frein, mais plutôt comme un accompagnateur du livre, surtout électronique.
Il serait aussi bon de ressusciter les bibliothèques publiques dans les quartiers, notamment, avec l’ouverture ou la réouverture des cercles culturels.
ACI : Quels conseils pouvez-vous donner aux jeunes, de plus en plus exposés, de nos jours, à l’hégémonie de l’audio-visuel du fait des réseaux sociaux ?
BM : « Il est facile de redresser un jeune arbre », dit un adage populaire. A ces jeunes exposés à l’hégémonie de l’audio-visuel, en raison des réseaux sociaux, je dirais que ce moyen de communication n’est pas à bannir totalement, mais qu’il a un côté nocif qui réside dans l’abus et le mauvais usage. Ainsi, ils ont intérêt à comprendre que le livre permet de développer la mémoire et les capacités cognitives ; améliore la concentration, l’attention, l’expression orale et écrite, tout en assurant la croissance des connaissances.
ACI : Quelle relation avez-vous avec le Bureau congolais de droits d’auteur (Bcda) d’une part et d’autre part, avec l’Union nationale des écrivains et artistes congolais (Uneac) ?
BM : A une période donnée, j’ai eu un contact avec le Bcda. J’y ai été édifié sur les conditions à remplir pour bénéficier des services de cette structure. On ne le dira jamais assez, l’Uneac est une organisation qui accompagne tant soit peu ses membres. Je vais penser à renouveler ma carte.
ACI : Pouvez-vous nous parler de vos nouveaux projets littéraires ?
BM : Pour l’instant, je n’ai aucun nouveau projet littéraire. Je parlerais plutôt d’un vieux projet d’écriture que je suis en train de revisiter.
ACI : Auriez-vous une préoccupation non abordée sur laquelle vous souhaitez- vous exprimer ?
BM : Une préoccupation ? Je l’aurais exprimée volontiers. Je pense que je dois plutôt m’acquitter d’un devoir, celui de dire mes sincères remerciements à l’Agence congolaise d’information (Aci), particulièrement à sa rédaction, de m’avoir accordé cette interview qui, je l’espère, retiendra l’attention des lecteurs du magazine spécial en préparation.
Je voudrais aussi saisir cette opportunité pour adresser mes félicitations à Madame la Directrice Générale pour tous les efforts qu’elle déploie pour relever les défis de cette agence, de même qu’à toute la rédaction pour son implication dans l’œuvre de renforcement de la notoriété de cette structure, grossiste de l’information.
Propos recueillis par Richard Kandza